Revenir au site

La France est championne d'Europe des charges sociales (patronales et salariales).

En France, pour 100 euros nets, il faut 235 euros de salaire "super brut"
26 mai 2019

La France est championne d'Europe des charges sociales (patronales et salariales). Il n'y a qu'en Belgique qu'il faut débourser encore plus pour que les salariés moyens disposent de 100 euros de pouvoir d'achat. Tour d'Europe de la pression fiscale et sociale sur les salariés.

Les Français n'auront jamais été «libérés fiscalement» aussi tard. C'est seulement à partir de ce mercredi, le 29 juillet, que les contribuables peuvent se considérer «libres» de travailler pour leur propre pouvoir d'achat et non plus pour les dépenses de l'État. Calculer le jour de libération fiscale revient en fait à identifier la pression fiscale et sociale supportée par le salarié français moyen. L'Institut économique Molinari (un think tank libéral franco-belge) effectue tous les ans depuis 2010 une étude comparative de cette pression dans l'Union européenne que Le Figaro a dévoilé en exclusivité ce lundi.

• Ce que l'employeur paie pour que le salarié dispose de 100 euros de pouvoir d'achat

Le salarié français est a priori l'un des mieux payé d'Europe (4e): le salaire «complet» moyen atteint presque 56.000 euros. Mais il est particulièrement fiscalisé (plus de 32.000 euros de charges sociales, impôt sur le revenu et TVA). Au final, il ne reste à l'employé français moyen que près de 24.000 euros, pour ses propres dépenses. Ce qui fait chuter la France au 11e rang en termes de pouvoir d'achat réel, selon l'Institut Molinari.

Ainsi en France, pour qu'un salarié moyen dispose de 100 euros nets de pouvoir d'achat, l'employeur aura versé 235 euros en 2015. Soit deux euros de plus que l'année dernière et cinq de plus qu'en 2010. Sur cette somme, 79 euros sont des charges patronales, 39 euros des charges salariales, 10 euros des impôts sur le revenu et 7 euros de la TVA.

La France, 2e pays européen en termes de pression fiscale

L'employeur moyen de l'UE doit débourser 187 € pour que le salarié moyen dispose de 100 € de pouvoir d'achat réel,
une fois payés 34 € de charges « patronales », 18 € de charges « salariales », 28 € d'impôt sur le revenu.

«La réalité des prélèvements obligatoires est sans rapport avec les ordres de grandeurs que les salariés ont en tête. Beaucoup se focalisent sur les impôts visibles, qui ne sont pas prélevés à la source, sans mesurer l'impact sur le pouvoir d'achat de prélèvements moins visibles tels que les cotisations sociales», commentent Cécile Philippe, Nicolas Marques et James Rogers dans leur étude 2015, critiquant au passage la volonté du gouvernement de mettre en place le prélèvement des impôts à la source à partir de 2018.

• La France, championne d'Europe des charges sociales

La France présente un profil de pression fiscale (taux de prélèvements global de 43,1%) diamétralement opposé à celui du Danemark: alors que la France est championne d'Europe des charges sociales (76% du salaire brut) et présente l'impôt sur le revenu le plus faible (7,5% des charges et impôts), le Danemark focalise la quasi-totalité de la fiscalité des salariés sur l'impôt sur le revenu (86%) alors que les charges sociales sont presque nulles.

Dans certains pays, les taux de cotisations sociales «employeurs» et «salariés» sont très proches. C'est notamment le cas aux Pays-Bas, au Royaume-Uni ou en Allemagne. Dans d'autres pays, les taux de cotisations «patronales» sont sensiblement plus élevés que les cotisations «salariales». C'est notamment le cas en Suède, en Espagne, en Italie, en Belgique ou en France.

• Les Français «libérés» fiscalement de plus en plus tard

De cette étude sur la pression fiscale et sociale en Europe, il en ressort un calendrier européen annuel des jours de libération fiscale, ce fameux jour où les salariés ont suffisamment cotisé en impôts et charges sociales pour honorer leurs prélévements obligatoires. Dans les années 1980, l'économiste libéral Milton Friedman parlait de jour d'"indépendance personnelle".

Entre 2010 et 2013, le jour de libération fiscale ainsi calculé tombait le 26 juillet en France, puis il s'est décalé au 28 juillet en 2014, avant d'encore reculer au 29 juillet cette année. Autrement dit, au fil des ans, le poids de la fiscalité s'est alourdi, face à une dépense publique qui n'a cessé d'augmenter (57,2% du PIB en 2014, un record historique). Seuls les Belges sont "libérés" plus tard que la France (le 6 août).

• Les Français en ont-ils pour leur argent?

Le modèle social à la française est bien connu: la dépense publique y est historiquement élevée pour proposer des prestations sociales larges et généreuses aux Français (routes, école, santé, sécurité de l'emploi, etc.). Alors, les Français en ont-ils encore pour leur argent? Pour l'institut Molinari, non: il n'y a qu'à regarder du côté des Pays-Bas, de la Suède ou du Danemark, connus aussi pour leur tradition sociale. La-bas, la protection sociale est comparable à celle de la France, pourtant les prélèvements sociaux sont bien moindres. Si bien qu'à la fin les Suédois, par exemple, ont un pouvoir d'achat presque 22% plus élevé que les Français.

En outre, malgré une pression fiscale forte, l'état des comptes publics ne s'est pas amélioré en France. Désormais, la dette française, à 97,2% du PIB, est supérieure à la moyenne européenne. "Aucun autre pays ne pratique une fiscalité plus importante et n'a des finances publiques aussi déséquilibrées», tranche l'institut. Et d'ajouter: «tous les pays ayant une fiscalité proche ont constaté des dérapages moindres (Belgique, Autriche) voire ont équilibré leurs comptes (Allemagne, Danemark, Luxembourg). (...) Malgré un tel niveau de charges sociales, le régime général d'assurance maladie est en déséquilibre systématique depuis 1989, l'assurance vieillesse depuis 2005 et la branche famille depuis 2008." Le Figaro